Expliqué : Pourquoi la comparaison entre le PIB par habitant de l'Inde et du Bangladesh a-t-elle tant retenu l'attention ?

Dans les dernières Perspectives économiques du FMI, le Bangladesh a dépassé l'Inde en termes de PIB par habitant. Alors que le Bangladesh a effectivement fait des progrès, sa population plus petite contribue à relever cette métrique. Quoi d'autre compte, que peut-il arriver maintenant?

Un homme travaille sur un chantier de construction à Dharmsala, le mardi 13 octobre 2020. (Photo AP : Ashwini Bhatia)

La dernière mise à jour du Fonds monétaire international sur les perspectives de l'économie mondiale a été publiée mercredi. Selon les estimations du FMI, en 2020, la croissance du produit intérieur brut (PIB) de l'Inde assister à une contraction de plus de 10 %. Cela fait plus que doubler le niveau de contraction - de 4,5% - que le FMI avait prévu pour l'Inde il y a quelques mois à peine.

Mais plus que la forte contraction, ce qui a attiré l'attention de tous, c'est qu'en 2020, le revenu par habitant d'un citoyen bangladais moyen serait plus que le revenu par habitant d'un citoyen indien moyen.

Comment est-ce arrivé? L'Inde n'est-elle pas l'une des plus grandes économies du monde ?

En règle générale, les pays sont comparés sur la base du taux de croissance du PIB ou sur le PIB absolu. Pour la plupart depuis l'indépendance, sur ces deux points, l'économie de l'Inde a été meilleure que celle du Bangladesh. Cela peut être vu sur les graphiques 1 et 2 qui cartographient les taux de croissance du PIB et le PIB absolu - l'économie indienne a été pour la plupart plus de 10 fois la taille du Bangladesh et a augmenté plus rapidement chaque année.

Source : Rapport sur les perspectives de l'économie mondiale, 2020

Cependant, le revenu par habitant implique également une autre variable - la population globale - et est obtenu en divisant le PIB total par la population totale. En conséquence, il y a trois raisons pour lesquelles le revenu par habitant de l'Inde est tombé en dessous du Bangladesh cette année.

* La première chose à noter est que l'économie du Bangladesh enregistre des taux de croissance rapides du PIB depuis 2004. Cependant, ce rythme n'a pas modifié les positions relatives des deux économies entre 2004 et 2016, car l'Inde a connu une croissance encore plus rapide que le Bangladesh. Mais depuis 2017, comme le montre le graphique 1, le taux de croissance de l'Inde a fortement ralenti tandis que celui du Bangladesh est devenu encore plus rapide.

*Deuxièmement, au cours de la même période de 15 ans, la population de l'Inde a augmenté plus rapidement (environ 21 %) que la population du Bangladesh (un peu moins de 18 %).

L'effet combiné de ces deux facteurs peut être vu dans la façon dont l'écart de PIB par habitant s'était considérablement réduit avant même le coup de Covid-19 (graphique 3). Le PIB par habitant du Bangladesh n'était que la moitié de celui de l'Inde en 2007, mais c'était juste avant la crise financière mondiale. Il représentait environ 70 % de celui de l'Inde en 2014 et cet écart s'est rapidement comblé au cours des dernières années.

*Enfin, le facteur le plus immédiat a été l'impact relatif de Covid-19 sur les deux économies en 2020. Alors que le PIB de l'Inde devrait baisser de 10 %, celui du Bangladesh devrait croître de près de 4 %. En d'autres termes, alors que l'Inde est l'une des économies les plus touchées, le Bangladesh est l'un des points positifs.

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Cela est-il déjà arrivé plus tôt ?

Oui. En 1991, alors que l'Inde traversait une grave crise et augmentait d'un peu plus de 1 %, le PIB par habitant du Bangladesh a dépassé celui de l'Inde. Depuis lors, l'Inde a de nouveau pris les devants.

L'Inde devrait-elle reprendre la tête ?

Oui. Les projections du FMI montrent que l'Inde connaîtra probablement une croissance plus rapide l'année prochaine et, selon toute vraisemblance, repartira de l'avant. Mais, étant donné la croissance démographique plus faible du Bangladesh et sa croissance économique plus rapide, l'Inde et le Bangladesh seront probablement au coude à coude dans un avenir prévisible en termes de revenu par habitant.

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Comment le Bangladesh a-t-il réussi à croître si vite et si vigoureusement ?

Dans les premières années de son indépendance avec le Pakistan, le Bangladesh a eu du mal à se développer rapidement. Cependant, s'éloigner du Pakistan a également donné au pays une chance de repartir à zéro sur son identité économique et politique. En tant que tel, ses lois du travail n'étaient pas aussi strictes et son économie impliquait de plus en plus de femmes dans sa main-d'œuvre. Cela se traduit par une participation plus élevée des femmes au marché du travail (graphique 5). L'un des principaux moteurs de la croissance a été l'industrie du vêtement, où les travailleuses ont donné au Bangladesh l'avantage de s'emparer des marchés d'exportation mondiaux dont la Chine s'est retirée.

Source : Global Hunger report, Informality and Covid-19, Banque mondiale

Cela aide également que la structure de l'économie du Bangladesh est telle que son PIB est dirigé par le secteur industriel, suivi par le secteur des services. Ces deux secteurs créent beaucoup d'emplois et sont plus rémunérateurs que l'agriculture. L'Inde, en revanche, a eu du mal à dynamiser son secteur industriel et compte encore beaucoup trop de personnes dépendantes de l'agriculture.

Au-delà de l'économie, l'une des principales raisons du taux de croissance progressivement plus rapide du Bangladesh est que, en particulier au cours des deux dernières décennies, il s'est amélioré sur plusieurs paramètres sociaux et politiques tels que la santé, l'assainissement, l'inclusion financière et la représentation politique des femmes.

Par exemple, malgré une proportion plus faible de sa population ayant accès à un assainissement de base, le taux de mortalité attribué à l'eau et à l'assainissement insalubres au Bangladesh est beaucoup plus faible qu'en Inde (graphique 5).

En ce qui concerne l'inclusion financière, selon la base de données Global Findex de la Banque mondiale, alors qu'une plus petite proportion de sa population a des comptes bancaires, la proportion de comptes bancaires dormants est assez faible par rapport à l'Inde.

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Le Bangladesh est également loin devant l'Inde dans les derniers classements de parité entre les sexes. Cela mesure les différences dans les opportunités politiques et économiques ainsi que le niveau d'instruction et la santé des hommes et des femmes. Sur 154 pays cartographiés, le Bangladesh est dans le top 50 tandis que l'Inde croupit à 112.

La même tendance vaut pour le Indice mondial de la faim . Le GHI va au-delà du traitement de la faim en termes d'apport calorique. Il examine quatre facteurs : la sous-alimentation (qui reflète une disponibilité alimentaire insuffisante), l'émaciation infantile (qui reflète une sous-nutrition aiguë), le retard de croissance chez les enfants (qui reflète une sous-nutrition chronique) et la mortalité infantile (qui reflète à la fois une nutrition inadéquate et un environnement malsain).

Outre les avancées qu'il a réalisées, à quels défis le Bangladesh est-il confronté ?

Les 15 dernières années ont été témoins d'un formidable revirement de la position du Bangladesh dans le monde. Il a laissé le Pakistan loin derrière et s'est sorti des premières années difficiles pour établir un système démocratique. Mais sa progression est encore incertaine. Par exemple, son niveau de pauvreté est encore bien supérieur à celui de l'Inde (graphique 4). En fait, selon la Banque mondiale, la pauvreté devrait augmenter considérablement à court terme, avec l'impact le plus élevé sur les travailleurs journaliers et indépendants du secteur non agricole et les travailleurs salariés du secteur manufacturier.

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Source : Informalité et rapport Covid-19 de la Banque mondiale

De plus, il est toujours derrière l'Inde dans les paramètres d'éducation de base et c'est ce qui explique son rang inférieur dans l'indice de développement humain.

Mais la plus grande inquiétude du Bangladesh n'est pas sur le plan économique, même si son industrie du vêtement peu réglementée est connue pour réduire la sécurité du travail et que les conditions de travail onéreuses commencent à avoir des répercussions néfastes sur la santé.

La plus grande menace pour ses perspectives émerge de sa politique quotidienne. Les principaux partis politiques se livrent régulièrement à une oppression violente les uns envers les autres. Sa vie publique quotidienne est criblée de corruption. Dans l'édition 2019 du classement de Transparency International, le Bangladesh se classe au 146e rang sur 198 pays (l'Inde est au 80e rang ; un rang inférieur est moins bien loti). Ajoutez à cela une vague massive d'islam radical, qui a entraîné la mort de plusieurs blogueurs pour avoir exprimé des opinions impopulaires.

Ces développements ont la capacité non seulement d'arrêter les réformes sociales progressistes du Bangladesh qui ont autonomisé les femmes, mais aussi de faire dérailler son miracle économique.

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Cet article est paru pour la première fois dans l'édition imprimée le 16 octobre 2020 sous le titre « La comparaison du Bangladesh ».

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